La nouvelle est tombée discrètement mais a provoqué un choc dans les milieux corporatifs : SAP, l’une des plus grandes entreprises technologiques au monde, met fin à ses programmes formels en équité, diversité et inclusion (EDI). Une décision qui relance le débat sur la place réelle de la diversité dans les stratégies d’affaires.
Mais d’abord, c’est quoi l’EDI ?
L’EDI fait référence à l’Équité, la Diversité et l’Inclusion.
- L’équité vise à offrir à chacun les ressources et opportunités dont il a besoin pour réussir, en tenant compte des désavantages systémiques.
- La diversité reconnaît et valorise les différences (genre, culture, âge, orientation, capacités, etc.).
- L’inclusion garantit que toutes les personnes se sentent valorisées, écoutées et intégrées dans l’organisation.
L’EDI est-il en train de devenir une tendance dépassée ou simplement mal comprise ?
Un revirement lourd de sens pour l’écosystème entrepreneurial
L’abandon de programmes EDI par une entreprise d’envergure comme SAP marque un tournant dans la façon dont les grandes entreprises abordent la question de la diversité et de l’inclusion.
Alors que plusieurs PME, startups et organisations d’impact social redoublent d’efforts pour bâtir des pratiques plus inclusives, cette décision pourrait envoyer un message dangereux. Voir d’autres entreprises désinvestir à leur tour, sous prétexte d’efficacité ou de conformité juridique, serait non seulement regrettable, mais aussi erroné d’un point de vue stratégique.
Les entreprises les plus inclusives sont 35 % plus susceptibles de surpasser leurs concurrentes en performance financière, selon McKinsey (2020). Celles qui favorisent une diversité de genre dans leurs équipes de direction affichent une rentabilité supérieure de 21 % en moyenne.
Autrement dit, l’EDI n’est pas une charge, c’est un moteur de performance durable.
Ignorer cet enjeu au nom de l’efficacité revient à se tirer une balle dans le pied.
Pourquoi l’équité et l’inclusion restent stratégiques, même sans programme dédié
L’inclusion ne peut être traitée comme une case à cocher.
Elle touche plusieurs leviers de performance organisationnelle :
- Meilleure rétention des talents
- Capacité à innover dans des marchés diversifiés
- Climat de travail plus sain et plus productif
Les pratiques de recrutement inclusif, la représentativité dans les postes décisionnels et la culture organisationnelle inclusive sont des éléments clés qui influencent directement la compétitivité à long terme.
Supprimer un programme sans renforcer la culture d’entreprise est risqué
SAP affirme vouloir “intégrer l’EDI dans toutes ses pratiques internes”, plutôt que de le gérer comme une initiative isolée. C’est une intention louable. Mais sans outils de suivi clairs, sans objectifs mesurables et sans leadership engagé, cette intégration risque de rester théorique.
Car peut-on vraiment transformer ce qu’on ne mesure plus ?
Un recul qui affecte aussi la rémunération équitable
Ce qui dérange particulièrement dans l’annonce de SAP, c’est qu’elle ne prendra plus en compte la diversité des sexes comme critère de rémunération de son directoire.
En supprimant ce critère, on ouvre la porte à un retour en force des pratiques de sélection biaisées.
Des pratiques souvent inconscientes, mais aux conséquences bien réelles sur la représentativité et l’équité au sein des instances de pouvoir.
Cela peut se traduire par :
- Une baisse du nombre de femmes dans les postes de direction
- Une homogénéisation des profils décisionnels
- Une perte de perspectives diversifiées dans les choix stratégiques
Et donc, moins de diversité entraîne des politiques moins inclusives, ce qui freine l’innovation, la croissance et la capacité à répondre aux besoins d’une clientèle diversifiée.
Ce que les entreprises et entrepreneurs peuvent apprendre de ce virage
Plutôt que de se décourager, ce moment doit inciter à la réflexion stratégique.
C’est le moment de :
- Recentrer l’EDI dans la mission et les valeurs de l’entreprise
- Outiller les équipes RH et les gestionnaires à détecter et corriger les biais
- S’assurer que la cohérence entre discours et actions demeure constante
Les entreprises qui sortiront renforcées de cette transition sont celles qui auront fait de l’inclusion une culture, et non un projet temporaire.
bâtir des modèles durables, inclusifs et cohérents
Ce revirement de SAP nous rappelle une chose essentielle : l’inclusion est toujours en construction.
Elle n’est jamais acquise, surtout dans un monde en constante mutation.
Pour les PME, les travailleurs autonomes et les organisations d’impact, c’est l’occasion de montrer la voie, en misant sur des pratiques concrètes et ancrées dans la réalité.
L’EDI ne doit pas être une mode, mais une norme d’avenir.